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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 08:37

suite de Jésus et la Samaritaine (5)

III. Vers la vérité intérieure

 

 

16. Il lui dit : « Va, appelle ton mari et reviens ici. »

 

Par sa question, Jésus – qui connaît déjà la réponse comme le montrera le verset 18 - ne cherche pas à éprouver ou à confondre la samaritaine, mais simplement à aviver sa conversion. Le Christ sonde le cœur des hommes (Jn 2, 23-25), et il a trouvé un cœur réceptif chez la samaritaine. Il n'est pas innocent que Jésus parle des “cinq maris” après le don de l'eau vive : Il lui donne la vérité car elle est prédisposée, car elle lui fait confiance comme Il lui fait confiance, cette double confiance n'étant pas irraisonnée puisqu'il y a déjà eu dialogue et surtout écoute.

 

On pourrait rapprocher cette demande de Jésus de l'enseignement de l'Apôtre : Si elles veulent s'instruire sur quelque point, qu'elles interrogent leur mari à la maison (1 Co 14, 35a). Néanmoins, je ne pense pas qu'il s'agisse vraiment de cela car Jésus parle directement aux femmes, tout comme la Vierge Marie, Marie de Magdala ou encore Marthe ont recueilli sa parole (cf. S. Tunc, Des femmes aussi suivaient Jésus, Desclée de Brouwer, Paris, 1998). Jésus ne lui demande t-Il pas plutôt, comme le suggère Saint Augustin de s'adresser à celui qui est le véritable mari de l'âme, c'est-à-dire lui-même ? C'est ici un appel à la réflexion de la Samaritaine qui ne doit pas s'arrêter aux seules choses matérielles, qui doit se dépasser pour accueillir le don de Dieu. Il n'y a donc pas référence à une quelconque supériorité du mari, mais au contraire appelle direct à l'esprit de la femme pour qu'elle reconnaisse la vérité qui lui parle. La Samaritaine doit donc être présente non seulement en corps, mais aussi en esprit, avec son mari spirituel (Johan. ev. tract., XV, 18-19).

 

17-18. La femme lui répondit : « Je n’ai pas de mari. » Jésus lui dit : « Tu as bien fait de dire : « Je n’ai pas de mari », car tu as eu cinq maris et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari ; en cela tu dis vrai. »

 

Ceux qui comptent pour Jésus, ce ne sont pas ceux qui passent leur temps à dire  Seigneur ! Seigneur !sans rien faire pour le rejoindre, mais bien plus ceux qui le connaissent par une voie intérieure, par la foi du coeur, car la foi n'est pas exhibition mais adhésion : Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu (Mt 5, 8). Ceci est totalement nouveau, car les hommes sont désormais enfants de Dieu non plus par naissance au sein du peuple juif mais par volonté et acceptation, par abandon au Seigneur;  Jésus fait ainsi passer l'homme d'une vie par interdits (cf. les lois contraignantes du Lévitique) à une vie par choix libre d'une démarche d'amour. On peut ici penser à la parabole sur la femme adultère [Jn 8, 1-11] : Jésus ne juge personne, ne condamne personne (Cf. Pasteur L. Basset, « Moi, je ne juge personne », Albin Michel/Labord et Fides, Paris, 1998. À noter que le sous-titre : L'Évangile au-delà de la morale n'est pas de l'auteur mais de l'éditeur...), au contraire de l'ancienne Loi qui faisait condamner à mort un homme coupable de ramasser du bois le jour du sabbat (Nb 15, 32-36).

 

Qui sont ces cinq maris ? Le puits est présenté par les juifs comme figure de la Loi, la Loi étant le don par excellence. Or, la Samaritaine, ayant eu cinq maris, est en rupture avec la Loi qui semble ne pas en admettre plus de deux ou trois. Ces cinq maris peuvent aussi être les cinq divinités des Samaritains (2 R 17, 29-41) : après la révélation de la nouvelle loi intérieure, Jésus dévoile le péché du peuple samaritain, qui est en fait  celui des hommes. En ce sens, les cinq maris seraient illégitimes.

 

Ils peuvent enfin, comme l'affirme Saint Augustin, être les cinq sens de la vie terrestre, la référence aux cinq sens n’étant d’ailleurs pas rare dans les paroles de Jésus. La Samaritaine doit abandonner ses sens charnels pour faire appel à son intelligence. Ce sont aussi ces cinq sens qui permettent d'accéder au message de Dieu, car ce sont eux que rejettent ceux qui ne veulent pas croire : Ainsi s'accomplit pour eux la prophétie d'Isaïe qui disait : Vous aurez beau entendre, vous ne comprendrez pas; vous aurez beau regarder, vous ne verrez pas. C'est que l'esprit de ce peuple s'est épaissi : ils se sont bouché les oreilles, ils ont fermé les yeux, de peur que leurs yeux ne voient, que leurs oreilles n'entendent, que leur esprit ne comprenne, qu'ils ne se convertissent et que le ne les guérisse (Mt 13, 14-15). Le lien est ici évident avec l'épisode de la Samaritaine ; il faut que la Samaritaine utilise ses cinq sens, mais en les dépassant, car les sens sans le cœur ne sont rien !La sagesse doit dépasser les choses temporelles pour accéder au mari véritable qui l'élèvera vers la vie éternelle (Johan. ev. tract., XV, 21).  En ce sens, les cinq maris seraient légitimes, car c'est Dieu qui a créé l'homme tel qu'il est, avec ses cinq sens pour voir, pour entendre, pour comprendre....

 

Dans tous les cas, la Samaritaine est instable, dispersée dans ses choix et ses croyances, mais Jésus la séduit et la stabilise par la beauté du don de Dieu.

 

A titre d’anecdote, on se souviendra qu’une autre femme du Nouveau Testament – elle aussi liée à un épisode clé de la démonstration du messianisme de Jésus : le débat entre Paul et Hérode Agrippa II chez Festus (Ac 25, 13—26, 32) – a eu cinq maris… Mais ces  maris étaient très matériels ceux-là : Marcus Alexander, Hérode de Chaldis (son oncle), Polémon (roi de Cilicie), Hérode Agrippa (ici une relation incestueuse avec son propre frère !), et enfin Titus (son amant ... qui la "plaquera" à son tour pour satisfaire le peuple de Rome. A chacun son tour de souffrir lorsque l'on vit hors de toute morale !)… Cette femme, c’est Bérénice, la nièce d’Hérode Antipas, celui-là même qui fit emprisonner puis décapiter Jean Baptiste (Mc 6, 17-28), c’est-à-dire celui qui précéda et annonça le Messie ! On remarquera que, malgré sa vie, malgré son péché, malgré sa parenté, sans adhérer vraiment au discours de Paul, elle dira avec les autres : Cet homme (…) n’a rien fait qui mérite la mort ni les chaînes (Ac 26, 31)…

 

19. La femme lui dit : « Seigneur, je vois que tu es un prophète…

 

La Samaritaine en arrive à la troisième étape de son adhésion au mystère de Jésus, de son initiation à l'esprit et à la vérité. La Samaritaine a définitivement compris que Jésus est autre, mais elle ne sait toujours pas ce qu'il est vraiment. Humaine, elle continue à se référer à son histoire : si Jésus n'est pas “Seigneur”, n'est-il pas “prophète” ? Même si la Samaritaine n'a pas encore compris la personne de Jésus, elle accède déjà à la vie intérieure, à la foi intérieure par son : Je vois. Elle commence à s'abandonner en toute confiance à Jésus : elle est désormais prête à recevoir l'eau, source de la vie éternelle, et cela même si elle n'a pas tout compris. Mais nous-mêmes, pouvons-nous vraiment comprendre toutes les dimensions et tout le contenu du mystère de Jésus ? Sa foi n'est peut-être pas encore en vérité, mais elle commence à l'être en esprit; elle est déjà au cœur, intérieure, cachée, mais bien réelle. Il ne lui manque plus grand chose pour devenir un témoin de la vérité et du Verbe incarné.

 

On peut ici encore songer au sacrement de la confirmation en son sens d'affermissement de la grâce (La confirmation ) ; la Samaritaine nous rappelle ici qu'il faut désirer recevoir la grâce de l'Esprit Saint, se rendre disponible intérieurement à l'accueil du Seigneur (la foi est ici celle du cœur, pas celle de la raison, du pari ou de l’intellectualité, y compris celle de Nicodème), mais surtout avoir conscience de sa petitesse et de sa pauvreté face à Dieu ; il faut, pour saisir au maximum, nous abandonner à Dieu, dans un bonheur et une joie indicibles, ... tant est il qu'il soit possible de saisir totalement le mystère divin sur cette terre où nous ne pouvons pas contempler la Face de Dieu, juste l'entrevoir au temps de l'adoration du Saint-Sacrement ou à celui de l'Eucharistie. La Samaritaine a elle la grâce de contempler Dieu “en direct”....

 

  à suivre sur Jésus et la Samaritaine (7)

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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 08:36

suite Jésus et la Samaritaine (6)

IV. La découverte du vrai culte : intérieur, en esprit et en vérité

 

 

20. Nos pères ont adoré sur cette montagne et vous, vous dites : C'est à Jérusalem qu'est le lieu où il faut adorer.»

 

Il est ici question de la vieille querelle entre les Samaritains et les Juifs quant à la situation du Temple. Alors que les Juifs ne peuvent le concevoir - selon les termes des Écritures - qu'à Jérusalem, les Samaritains considèrent le mont Garizim comme l'endroit le plus sacré de la terre; ils considéraient ce lieu comme le centre du monde, existant avant la création (sic !!!), ayant échappé au déluge et devant survivre au Jugement dernier : l'incompréhension était donc grande. Cette querelle s'était envenimée lorsque, selon Flavius Josèphe (Guerre des Juifs I, 62-66), Jean Hyrcan rasa en ~128 le sanctuaire samaritain du mont Garizim. C'est pour éteindre ces vieilles et stupides querelles que l'Église catholique ne parle plus de lieux sacrés, même si certains, tel Lourdes, sont considérés comme ayant été “touchés” par Dieu.

 

21-22. Jésus lui dit : « Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Vous, vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs.

 

Par Jésus, c'est l'homme qui devient le Temple ; on peut ici penser à l’Epître aux Hébreux... Comme l'a dit Saint Boniface, ou encore Saint François d'Assise, Dieu est partout, même s'il ne faut pas tomber dans l'erreur du fétichisme ou de l'animisme ; Dieu est partout, mais sa création n'est que témoignage de sa présence, non pas partie de Dieu lui-même.

 

Ce verset me pousse à réfléchir sur les notions de transcendance et d'immanence, sur le rôle de l'homme dans la création. Au contraire de la transcendance qui établit une relation personnelle avec Dieu, l'immanence exprime l'idée de la fusion de l'être dans la conscience collective; elle réfute donc dans sa finalité toute notion d'individualité et d'individualisme, tendant donc non à l'exclusion mais à l'anéantissement de celui qui n'y adhère pas. L'immanence est donc par essence totalitaire. L'immanence est de plus inhumaine en ce sens qu'elle nie la perception qui est à la base même de l'humanité et de la conscience ; c'est ainsi que Spinoza définissait l'immanence comme l'idée que la vérité de la chose ne réside pas dans la perception mais dans sa place dans le système de l'esprit absolu. Donc, si l'immanence ne remet pas forcément en cause Dieu, elle dénie à ce dernier son unicité en le divisant en de multiples éléments qui sont les éléments constitutifs du monde; ainsi Dieu n'est pas le créateur du monde car il est lui-même le monde. Or, pour le chrétien, Dieu est distinct de sa création. Un autre aspect négatif de l'immanence procède du fait que, suite aux écrits de Blondel, notamment ceux de 1893, elle s'oppose, certes au fidéisme - ce qui n'est pas forcément négatif -, mais surtout à la foi elle-même car donnant une priorité absolue à la raison; ainsi, il n'y a pas équilibre entre la foi et la raison mais subordination de la foi à la raison puisque, selon Blondel, si Jésus existe, c'est de la raison et d'elle seule que doit émerger la nécessité d'un oui total à la Révélation chrétienne. Négation de la grâce, l'immanence n'est donc pas chrétienne malgré ses aspects séduisants au premier abord. Alors que l'immanence pourrait finalement conduire l'homme à négliger soit sa propre existence, soit celle de la création du fait de l'absence de toute remise en cause de l'équilibre de l'univers, la transcendance impose au contraire à l'homme, certes une certaine maîtrise du monde terrestre, mais surtout un respect de la création, tout irrespect le conduisant inéluctablement à sa perte du fait de sa relation personnelle avec Dieu par l'alliance et par la révélation. La transcendance n'est donc pas la traduction du seulement humain, mais bien plus la réalisation d'une fusion permanente et évocatrice entre l'humain et le sacré, entre l'homme, créature de Dieu, la nature, objet de la création, et Dieu créateur. Alors que l'immanence est par nature statique - ou du moins figée lorsqu'elle se veut dynamique -, la transcendance se veut progrès, mais progrès respectueux de la création; alors que l'immanence implique une création figée, la transcendance implique une création évolutive, l'homme ayant été créé par Dieu pour qu'il continue, pour qu'il peaufine, sa propre création, et c'est pour cela qu'il est dit que Dieu créa l'homme à son image, l'homme étant établi dans un lien personnel à Dieu et chargé d'une double mission de préservation et d'amélioration. On pourrait presque dire que Dieu a joué son existence même en créant l'homme, même si une telle expression est à la limite du dogme ; ceci doit en fait être compris comme sublimation du lien de l'homme à Dieu et non pas dans le sens d'une dépendance de Dieu envers l'homme. C'est en cela que les théories contemporaines tendant à concevoir le divin dans un sens uniquement d'immanence sont dangereuses, car permettant tous les excès, la création et Dieu lui-même n'étant qu'énergie et cette énergie étant immuable quelle qu'en soit la forme. Admettre que la relation entre Dieu et l'homme est une relation d'immanence, c'est en fait nier l'homme lui-même, car le réduire au seul sens de point de l'histoire terrestre, alors que Dieu l'en a établi le maître ; c'est nier le Christ car privant la révélation de toute signification; c'est nier la nature elle-même, puisqu'elle se trouve ainsi réduite seulement à une forme particulière de l'énergie cosmique universelle, puisque seule cette énergie cosmique universelle compte, quelle qu'elle soit.

 

Néanmoins, nous ne devons pas oublier que l'immanence chrétienne existe, mais il faut bien la situer au risque de se perdre car elle n'a rien à voir avec le sens contemporain que l'on veut donner à ce mot, alors même que l'immanence chrétienne est contemporaine en son éternité. Je ne parlerai bien sûr pas de l'immanence des trois personnes de la Trinité en elles-mêmes puisque dans la Trinité il n'y a qu'une seule nature, qu'une seule essence, qu'une seule substance, qu'une seule éternité, qu'une seule divinité 4° Concile du Latran, II, DS 803-808)LIEN. Je parlerai par contre de cette immanence que nous connaissons à l'occasion de l'acceptation de chacun des trois sacrements de l'initiation chrétienne ou encore dans celui de la réconciliation :

• le baptême est en premier lieu une grâce, une nouvelle création (2 Co 5, 17) faisant du baptisé un fils adoptif aimé de Dieu : le baptême est délivrance des ténèbres. En tant que fils adoptif de Dieu, le baptisé est réconcilié avec Jésus et se doit donc de participer à la vie du Christ et à sa mission. Le baptême est aussi une incorporation, celle de membre du corps unique du Christ qu'est l'Église. Le baptisé est ainsi invité à participer au sacerdoce du Christ. Temple vivant de l'Esprit Saint, le baptisé est d'une certaine manière un nouvel Apôtre. Pierre vivante de l'édifice spirituel qu'est l'Église (1P 2, 5), le baptisé ne s'appartient plus : il appartient désormais, et ce de manière définitive à Jésus mort et ressuscité; il est membre de la communauté de l'Église, donc membre du peuple de Dieu, celui de la nouvelle alliance. Marqué de la nouvelle alliance, le baptisé l'est donc d'une trace indélébile qui fait que le baptême est un sacrement unique, non renouvelé - a contrario par exemple du sacrement de l'Eucharistie qui est mémoire et accès subtil et hors du temps à la vie éternelle -. Après le baptême, le baptisé est définitivement uni au Christ, le péché -né par nature d'une créature- ne pouvant briser cette union même s'il empêche d'accéder - en l'absence de pénitence et de réconciliation - aux fruits du salut. Incorporation définitive, le baptême est le sceau qui marque le chrétien pour le jour de la rédemption, le sceau de la vie éternelle entr'aperçue lors du sacrement de l'Eucharistie. Le baptême est donc une forme de l'immanence chrétienne ;

• l'effusion de l'Esprit de la confirmation est enrichissement et fortification de notre foi ; cela nous oblige donc à répandre et à défendre la foi, en parole et en action, faisant de nous des témoins vivants du Christ. On peut penser ici au  du Confiteor, la grâce de l'Esprit Saint, unie au sacrement de pénitence et de réconciliation, transformant le mal du péché en bien. L'effusion de l'Esprit nous fait saisir par l'amour de Dieu, dans un don réciproque d'amour : l'amour de Dieu qui nous est offert, mais aussi l'offrande aimante de soi à Dieu auquel on doit s'abandonner : il nous faut, à l'imitation du Psalmiste, goûter et voir comme est bon le Seigneur. L'effusion de l'Esprit est donc expérience de l'amour de Dieu, amour dont le désir vient lui-même de Dieu. L'effusion de l'Esprit est un moment de grâce, un cadeau de l'Esprit Saint; c'est un moment de joie qui donne le désir et la capacité de nous offrir totalement à la vie du Christ par l'Esprit Saint donc au Père. En acceptant la confirmation, nous disons à Dieu Prends tout ! Prends nous tout !, et ce avec joie et reconnaissance de sa miséricorde. Nous devons donc saisir cette expérience unique de l'amour de Dieu comme un don gratuit qui nous rappelle que Jésus est vivant, ressuscité, présent et agissant dans nos vies. Il faut, pour saisir au maximum - tant est il qu'il soit possible de saisir totalement le mystère divin sur cette terre -, nous abandonner à Dieu, dans un bonheur et une joie indicibles. La confirmation est aussi un signe fort de notre communion avec l'Évêque, l'Église, donc le Christ dont elle est le corps mystique, d'où l'idée renforcée de communauté des croyants, de communion avec ses frères, mais aussi avec tous les hommes, Jésus ayant rouvert l'Alliance à toute l'humanité. La confirmation est donc un temps fondamental et essentiel de la vie du chrétien, mais il est donc fort dommage que beaucoup n'en saisissent pas le sens....  Elle est au sens de ce qui précède elle aussi immanence chrétienne;

• L'Eucharistie, enfin, cette "célébration du célébré", ce don de la vie éternelle, cette insertion plénière dans le corps du Christ est elle aussi immanence. Mystère de la plénitude du Christ, nous devons accepter en esprit et en vérité que le Christ est présent dans l'Eucharistie pour rendre présente sa victoire sur la mort et sur le péché. L'Eucharistie vise à rendre présente et à proclamer la victoire et le triomphe de la mort de Jésus-Christ par la vertu de l'Esprit Saint, et, en ce sens, elle est incorporation de nous-mêmes au corps du Christ, participation à sa vie glorieuse ; elle est suspension du temps instantané, mais en des moments isolés et hors du temps nous mettant en contact direct - y compris physique - avec Dieu, et c'est pourquoi nous devons renouveler ce sacrement car il est impossible d'exprimer la totalité du mystère de l'Eucharistie, tout comme il est impossible de vivre sur cette terre marquée par le temps - survivance physique du péché originel - l'éternité vivante et dynamique. Créant une communion entre nous et le Ciel, entre l'Église et le Ciel, l'Eucharistie est le sommet et le centre de la vie de la communauté chrétienne, tous les fidèles se devant d'y participer, offrant à Dieu la victime divine et s'offrant ainsi eux-mêmes avec elle comme membres du corps du Christ. L'Eucharistie est donc bien elle aussi immanence chrétienne....

• cette immanence chrétienne se retrouve enfin dans le sacrement de réconciliation. La réconciliation est en effet un deuxième baptême, non plus dans les eaux, mais dans les larmes. La réconciliation permet de retrouver sa place dans la communauté ecclésiale et la grâce de l'amour du Père. Elle est ainsi le lieu privilégié d'exercice de la miséricorde divine. Comme l'a dit le Frère Jean Legrez o.p. lors d’une conférence prononcée le 2 mars 1999 : Si un baptisé a commencé à entrer dans le mystère de la miséricorde du Père, il doit comprendre que la réconciliation est un retour vers le Père, qu'il doit, après l'avoir blessé par le péché, faire un retour vers Lui; mais pensons-nous vraiment au Père lorsque nous nous confessons ? Quelle  utilité  alors ? La réconciliation ne doit pas être tristesse mais au contraire moyen de demeurer sur un chemin joyeux, celui de la communion, de la communauté par et en l'amour du Père, celui de la joie d'un cœur pardonné tourné vers le père et donc vers tout frère en humanité. La réconciliation est elle aussi une forme d'immanence chrétienne....

 

Comment ne pas penser ici à la conversion des Samaritains (Ac 8, 4-25) ou encore à l'épisode du baptême de  l'eunuque éthiopien qui  poursuit  son chemin tout  joyeux après  le baptême (Ac 8, 26-39) ? L'accueil de la foi par les Samaritains annonçait une résurrection pour le peuple divisé. Le retour chez lui de cet adorateur du bout du monde, après son baptême par Philippe, annonce l'essaimage des lieux d'adoration par toute la terre. En ces jours décisifs, le Ressuscité se donnera bientôt à rencontrer en tout lieu, par ses messagers. Partout sa vie se donnera à partager aux croyants (...) Le Lieu saint a repris la route pour aller dresser sa tente en toute nation où réside un croyant messianique» (Ph. Bossuyt sj, L’Esprit en Actes, Lessius, Bruxelles, 1998, coll. Le livre et le rouleau, n° 3, page 46). L'annonce faite par Jésus en [Jn 4, 21] s'accomplit, les deux épisodes cités des Actes des Apôtres étant là pour en témoigner, tout comme l'actuelle diffusion de la foi le démontre aussi puisqu'il y avait en 1997 1.005.000.000 de catholiques dans le monde (La Croix, 3 mars 1999, page 15), auxquels il faut ajouter entre 750 et 800 millions de protestants et d'orthodoxes ; ce sont aujourd'hui près de deux milliards d'hommes, environ le tiers des hommes qui sont touchés par la Bonne Nouvelle. Un long chemin a été parcouru, mais il reste encore du chemin à parcourir, mais par l'exemplarité de la foi, non pas par la persécution ou la contrainte ! Si l'on rajoute à ce total le milliard de musulmans de diverses confessions, ce sont plus de trois milliards d'hommes qui connaissent Jésus Christ, car, - et il ne faut pas l'oublier -, même s'ils se trompent sur la nature de Jésus en niant sa divinité et la Trinité - ce qui est quant même fondamental pour nous chrétiens -, les musulmans reconnaissent que Jésus est le Messie, fils de Marie, le Coran consacrant plus de 100 versets à Jésus, sans même parler des très nombreux textes qui lui sont consacrés dans la littérature et la philosophie coranique (pour  en savoir plus :  Borrmans (M.), Jésus et les musulmans d'aujourd'hui, Desclée, Paris, 1996, coll. Jésus et Jésus-Christ, n° 69). N'oublions pas aussi que le Mahatma Gandhi avouait lui-même avoir été guidé dans sa pensée par ... le message des Béatitudes !!!  Même Lénine a dit : Quelques gouttes de sang de Saint François d’Assise suffiraient à régénérer l’humanité !!! Les communistes ont cependant tôt fait d'oublier cette phrase terrible, car finalement si proche de la pensée chrétienne ! Mais quelle vérité dans la bouche d'un ennemi de la Religion, dans celle d'un athée.... La Parole a donc fait du chemin, mais il lui en reste beaucoup à parcourir......

 

Souvenons-nous donc du sens de la confirmation pour être de vrais témoins de Jésus, mais je le répète, par l'exemple, par notre vie quotidienne, par notre témoignage plein de paix et d'amour, y compris par le martyr, mais en aucun cas par la guerre, par la discorde, par le martyr provoqué, car celui-ci est insulte à Dieu, alors que le martyr vrai (cf. Ac 7, 1-60) est une grâce de Dieu à laquelle l'on ne s'attend pas, car le martyr vrai est aussi témoignage et pardon : Seigneur, ne leur impute pas ce péché (Ac 7, 60). C'est là le sens du martyr de Maximilien Kolbe, de celui d'Édith Stein, .... On peut ici avoir une pensée émue pour le martyr de Saint André Dung-Lac et ses compagnons, au Vietnam, en 1839 (cf. Famille Chrétienne, n° 1088, 19 nov. 1998, page 23), ou encore pour celui, en 1998 !, de ces 40 séminaristes du Burundi massacrés pour avoir refusé de dénoncer ceux qui, parmi eux, étaient des Hutus, étaient des Tutsis ; on peut aussi penser à Saint Abo, mort martyr des musulmans en 786 parce qu'il ne voulait pas renier Jésus-Christ.... Et ce ne sont là que des exemples infimes, mais toujours présents, dans la multitude des martyrs pour le Christ.... N'oublions pas qu'ils sont allés au supplice en pardonnant à leurs bourreaux !!! Qui mieux que les martyrs pour le Christ a appliqué pleinement le commandement d'Amour de ce dernier, à la suite d'Étienne, premier martyr, qui devait s'endormir dans la mort en pardonnant et en priant pour ses bourreaux : Seigneur, ne leur impute pas ce péché (Ac 7, 60) ? Je me répète peut-être, mais cela est fondamental. Soyons des témoins, des exemples, soyons des témoignages vivants de la miséricorde divine, des porteurs de réconciliation, pas des exhibitionnistes !

 

23-24. Mais l'heure vient -et c'est maintenant- où les véritables adorateurs adoreront le Père dans l'esprit et la vérité, car tels sont les adorateurs que cherche le Père. Dieu est esprit, et ceux qui adorent, c'est dans l'esprit et la vérité qu'ils doivent adorer.»

 

La vérité, c'est la découverte progressive, la recherche de la Parole de Dieu en écoutant cette même Parole. Comme le dit le père André Marchadour, à la source extérieure doit se substituer  la source intérieure à chacun, révélatrice de la vérité intérieure de chaque croyant, débouchant sur un culte intérieur (A. Marchadour, op. cit., page 80). Il dit encore : Ce culte en Esprit et en vérité est celui que chaque croyant habité par l'Esprit rend au Père. Il est intérieur, non pas parce qu'il serait localisé dans la partie la plus intérieure de chacun, mais parce qu'il est l'œuvre de l'Esprit : c'est l'adoration véritable que l'Esprit Saint qui est vérité (c'est-à-dire révélation) suscite en nous, qui provient de sa présence et de sa permanence en nous (...) Une telle naissance d'un culte spirituel s'appuie sur la révélation du mystère de Dieu (...) Désormais Dieu n'est plus relié à une terre (...), mais habite dans le cœur de tout homme, en qui l'Esprit a fait sa demeure (A. Marchadour, op. cit., page 81). En recevant cette révélation, la Samaritaine a retrouvé son vrai mari, car elle peut comprendre que le vrai culte est inspiré par l'Esprit Saint, par le don que lui fait le Fils et pour la plus grande gloire du Père....

 

  à suivre sur Jésus et la Samaritaine (8)

 

 

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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 08:35

suite de Jésus et la Samaritaine (7)

V. La Révélation : « JE LE SUIS »

 

25-26. La femme lui dit : « Je sais que le Messie doit venir, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, il nous expliquera tout. » Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. »

 

On est ici à un moment décisif qui marque l'avant-dernière étape de la Samaritaine vers l'adhésion au mystère du Christ, après avoir professé qu'elle croyait fermement en la venue du Messie. Jésus se révèle définitivement à la samaritaine : il est le Messie, comme elle commençait à s'en douter au verset précédent. C'est la Révélation ! La samaritaine vit peut-être en cet instant le premier sacrement de l'initiation chrétienne, celui du baptême, car elle a reçu l'eau vive, source de la vie éternelle.  Dans le cadre de la Révélation, Dieu, seul et unique, un et trine, a quelque chose à dire aux hommes. Pour ce faire, il s'est révélé à eux en s'incarnant en Jésus-Christ. Dieu se montrant aux hommes - et s'adressant directement à eux -, la Révélation est donc, dans sa manifestation humaine, vérité vivante et absolue, car divine non pas en essence, mais en principe même. La Révélation est pour le chrétien une vérité absolue, mais surtout et avant tout une vérité vivante.

 

Jésus se révèle en des termes qui sont proches du témoignage de Jean Baptiste : Et voici quel fut le témoignage de Jean, quand les Juifs lui envoyèrent de Jérusalem des prêtres et des lévites pour lui demander :  « Qui es-tu ? » Il confessa, il ne nia pas, il confessa : « Je ne suis pas le Christ. » -  « Qu’es-tu donc ? lui demandèrent-ils. Es-tu Elie ? » Il dit : « Je ne le suis pas. » - ‘ »Es-tu le prophète ? »  Il répondit : « Non. » (Jn 1, 19-21). Comme le disait Jean Baptiste, Il est, Il arrive : Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. C’est de lui que j’ai dit : Derrière moi vient un homme qui est passé devant moi parce que avant moi il était (Jn 1, 29b-30).

 

Dieu lui même s'était révélé à Moïse dans des termes très proches : quoi de plus beau que le  Je suis celui qui suis d’[Ex 3, 14]. Dieu, qu'il soit Père, Fils ou Esprit conserve le même langage pour parler aux hommes, pour se révéler.

 

Le  Je le suis de Jésus est le même que celui de [Mt 18, 20] : Que deux ou trois, en effet, soient réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux. Jésus s'est révélé, il est au milieu de nous, la gloire de Dieu est présente, l'Église et le culte ont désormais leur(s) fondement(s) en esprit et en vérité.

 

Plus que se comprendre, plus que se lire, plus que se commenter, ce passage doit se méditer ! par exemple en le confrontant avec [Jn 1, 49]…

 

 


VI. Avec les disciples : le sens de la mission

 

 

27. Là-dessus arrivèrent ses disciples, et ils s'étonnaient qu'il parlât à une femme. Pourtant pas un ne dit : « Que cherches-tu ? »  ou « De quoi lui parles-tu ? »

 

...ils s'étonnaient qu'il parlât à une femme.

 

Les disciples sont choqués, frappés d'incompréhension face à l'étranger qu'ils craignent car le supposant impur, face à la femme qui ne jouit pas, malgré [Gn 1, 27-28] d'un statut égal à celui de l'homme ; ils ne sentent pas encore vraiment impliqués dans l'oeuvre de Jésus, ce qui sera fait avec l'énoncé de la volonté du Père et leur institution comme moissonneurs (voir les versets 34 à 38).

 

Pourtant pas un ne dit :  «Que cherches tu ?» ou «De quoi lui parles tu ?»

 

Les disciples n'ont pas encore compris le message de Jésus; ils n'ont pas encore compris que Jésus a apporté quelque chose de neuf : la Bonne Nouvelle offerte à toute l'humanité et non plus au seul peuple élu. Néanmoins, nul n'ose lui poser directement la question car ils ressentent sans le comprendre, par intuition, que quelque chose de fondamental est en train de se passer, de se révéler à eux.

 

28-29. La femme alors laissa là sa cruche, courut à la ville et dit aux gens : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? »

 

Jésus s'est révélé à la Samaritaine ; tout comme Marie avant elle, la samaritaine est celle qui a vu et qui a cru : elle a reçu l'eau vive demandée au verset 15. Elle peut donc abandonner sa cruche, un bien important, au puits puisqu'elle n'en aura plus besoin. Elle a assouvi sa soif , le Christ ayant ouvert en elle la source de la vie, lui donnant une autonomie et un sens. Elle n'a plus qu'une envie, faire partager sa joie aux siens. Elle est devenue un témoin vivant du don de Dieu...

 

30. Ils sortirent de la ville et ils se dirigeaient vers lui.

 

Les champs qui mûrissent dans la plaine autour du puits de Jacob sont le symbole de la moisson spirituelle dont les Samaritains qui marchent vers Jésus sont les prémices. Le lien est ici évident avec les versets 35 à 38 sur la moisson.

 

Ils marchent, car toute l'alliance est mouvement vers Dieu. On remarquera que toutes les alliances conclues entre Dieu et les hommes ont en commun la marche, l'envoi, le mouvement, mais aussi don d'une responsabilité parfois difficile à assumer [Nb 11, 10-15] : Noé dans son arche, Abraham vers Canaan, Moïse vers la Terre promise, les apôtres vers le monde entier, ce qui signifie que quand Dieu s'adresse à nous, ce n'est pas toujours facile : il faut “se bouger”, Dieu nous soutenant alors : Mais ceux qui espèrent en Yahvé renouvellent leur force, ils déploient leurs ailes comme des aigles, ils courent sans s’épuiser, ils marchent sans se fatiguer (Is 40, 31).

 

L'homme chrétien, l'homme respectueux de Dieu est donc l'homme qui marche, l'homme qui agit. Il doit tendre vers Dieu, même s'il ne peut l'égaler car l'homme n'est pas Dieu mais créature, ce qui lui impose la précaution, la responsabilité et le respect de la création, bref l'amour du prochain; ceci est devenu un impératif encore plus fort à l'heure du génie génétique, le risque pour l'homme étant de se croire l'égal de Dieu, ce qu'il n'est pas et ne pourra jamais être (Is 40, 25), prenant alors le risque non plus de sauvegarder la création mais de la détruire, soit directement, soit en la pervertissant. Le modèle de perfection de la Vierge Marie est là pour nous aider à trouver les pas de Dieu, à trouver le sens de nos vies, car elle est créature immaculée, donc humaine et ainsi immédiatement accessible à la raison. La Vierge Marie est là pour nous guider, non comme substitut au Père, mais comme intercession suprême et glorieuse. Donc, osons, mais en dignes enfants de Dieu, libres mais surtout responsables.

 

On peut ici se souvenir de l'épisode du buisson ardent : Le buisson était embrasé mais le buisson ne se consumait pas (Ex 3, 2). Si Moïse va changer son chemin pour aller voir ce buisson “mystérieux”, il ne sait pas encore qu'il vient, ébloui par Dieu, de changer le chemin de sa vie; désormais, ayant vu Dieu qui s'exprime au travers de ce buisson et traduit sa magnificence par ce feu, expression solennelle de l'Esprit si l'on médite sur Pentecôte, il ne peut plus ignorer ni ses frères, objets de sa mission, ni surtout Dieu, ou plutôt sa révélation. Il en sera de même pour les samaritains, l'aboutissement de leur démarche étant la proclamation du verset 42.

 

31-33. Entre-temps, les disciples le priaient, en disant : « Rabbi, mange. » Mais il leur dit : « J’ai à manger un aliment que vous ne connaissez pas. » Les disciples se disaient entre eux : « Quelqu’un lui aurait-il amené à manger ? »

 

Ce malentendu sur la nourriture que font les disciples peut être rapproché du malentendu sur l'eau des versets 7 à 11. Les disciples ne sont que des hommes, et eux aussi ont besoin de cheminer pour trouver Dieu. N'ayons donc pas honte de nos faiblesses humaines : mêmes les Apôtres n'ont pas toujours compris le Christ, et ce jusqu'au jour de la Pentecôte.

 

Souvenons-nous des disciples rejetant les “petits enfants” (Mc 10, 13-16) ou encore de la foule suivant Jésus, dont font partie les disciples, rejetant Bartimée, l'aveugle de Jéricho, malgré son cri d'incroyable confiance (Mc 10, 46-52). Ne sommes-nous pas nous-mêmes cette foule en rejetant certains de nos frères, en refusant de les écouter ?

 

34. Jésus leur dit : « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé et de mener son œuvre à bonne fin. »

 

Jésus annonce aux disciples que l'heure est venue : celle de la moisson nouvelle, celle de la réalisation de la volonté du Père. Sa nourriture, c'est la Bonne Nouvelle qu'Il offre au monde, à toutes les nations.

 

35-38. Ne dites-vous pas : Encore quatre mois et vient la moisson ?  Eh bien !  je vous le dis : Levez les yeux et regardez les champs, ils sont blancs pour la moisson. Déjà le moissonneur reçoit son salaire et récolte du fruit pour la vie éternelle, en sorte que le semeur se réjouit avec le moissonneur. Car ici se vérifie le dicton : autre est le semeur, autre le moissonneur;  je vous ai envoyés moissonner là où vous ne vous êtes pas fatigués ; d'autres se sont fatigués et vous, vous héritez de leurs fatigues.»

 

Les semeurs, ce sont les Prophètes qui ont ensemencé la terre de la parole de Dieu, les moissonneurs, ce sont les Apôtres, mais tous doivent se réjouir ensemble car ils ont participé à l'œuvre de Dieu.... Le Christ accomplit une histoire pour en ouvrir une autre : celle de la Bonne Nouvelle offerte en don gratuit à tous les hommes, mais la moisson a été préparée de longue date. Par l'appel qu'Il lança à Moïse, par la définition de sa vocation (Ex 3, 1-20), Dieu lui donna une mission, sauver son Peuple. Comme le Seigneur a envoyé Moïse pour guider son Peuple, pour semer, Jésus a envoyé ses apôtres  remplis de l’Esprit Saint (Ac 2, 4) pour transmettre la Bonne Nouvelle au monde, pour semer et surtout pour moissonner....

 

Repensons ici à [Ga 3, 26-28] : Car vous êtes tous fils de Dieu, par la foi, dans le Christ Jésus. Vous tous en effet, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ : il n'y a ni Juif ni Grec, il n'y a ni esclave ni homme libre, il n'y a ni homme ni femme : car tous vous ne faites qu'un dans le Christ Jésus.

 


VII. Les premières moissons : la conversion des samaritains de sychar

 

 

39. Un bon nombre de Samaritains de cette ville crurent en lui à cause de la parole de la femme, qui attestait : « Il m’a dit tout ce que j’ai fait. »

 

On peut ici penser au doute de l'Apôtre Thomas : Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru (Jn 20, 29b).

 

On remarquera qu'alors que les Juifs ne croyaient en Jésus qu'au travers de ses miracles et des signes qu'il donnait (Comme il était à Jérusalem durant la fête de la Pâque, beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu'il faisait. Mais Jésus, lui, ne se fiait pas à eux, parce qu'il les connaissait tous et qu'il n'avait pas besoin d'un témoignage sur l'homme; car lui-même connaissait ce qu'il y avait dans l'homme [Jn 2, 23-25]), les Samaritains n'ont pas besoin de le voir pour le croire : ils croient en  Jésus non pas à cause de ses gestes, mais à cause de sa parole, à cause du seul témoignage premier de la Samaritaine.

 

40-41. Quand donc ils furent arrivés près de lui, les Samaritains le prièrent de demeurer chez eux. Il y demeura deux jours et ils furent bien plus nombreux à croire, à cause de sa parole,

 

Un parallèle peut être fait avec : C’est au sujet de ce puits que Yahvé avait dit à Moïse : « Rassemble le peuple et je leur donnerai de l’eau (Nb 21, 16b). Rassembler le peuple, c'est ce que fait Jésus, et ce qu'il ne cessera de faire jusqu'à l'accomplissement. Rassembler le peuple pour lui donner l'eau vive, c'est ce qu'il ne cesse de faire, même aujourd'hui, et nous nous devons de l'assister par notre témoignage, par notre confirmation....

 

On remarquera que la barrière entre Juifs et Samaritains est tombée : Jésus réside chez des Samaritains qui l'ont invité, l'accueillent fraternellement. Les samaritains ont compris le message d'amour..., et comment ne pas penser ici à ce passage de l'Évangile de Matthieu : Venez les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume qui vous a été préparé depuis la fondation du monde. Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli (Mt 25, 34-35) ? Un dialogue s'est instauré entre les nations..., et la vraie grâce, c'est de vivre sa libération, de prier pour et avec les autres.

 

Nous avons à Marseille un lieu qui symbolise cette grâce : Notre-Dame de la Garde, l'un des principaux sanctuaires dédié à Marie et où l'on va souvent non pas pour prier pour soi-même mais pour demander quelque chose pour un autre ! C'est là un miracle permanent, d'autant plus que tous vont y prier, y compris des athées, y compris des musulmans ! La lumière de la Vierge de la Garde sur notre ville est un témoignage de la grâce divine; à nous de ne jamais laisser s'éteindre cette lumière !

 

 

 

VIII. La vraie foi et le vrai culte : Jésus, sauveur du monde

 

 

42. ...et ils disaient à la femme : « Ce n’est plus sur tes dires que nous croyons ; nous l’avons-nous-mêmes entendu et nous savons que c’est vraiment lui le sauveur du monde. »

 

La Révélation est accomplie, l'adhésion au mystère de Jésus -hormis sa Résurrection, mais le temps n'est pas encore venu- est achevée : tous comprennent que Jésus est plus qu'un “Seigneur”, plus qu'un “prophète”, plus même qu'un “Messie” sacerdotal ou royal : il est  bien plus que tout cela, même s'il est “Seigneur”. Il est le Messie, le Sauveur du monde, celui par qui le dessein du Père s'accomplit pour l'éternité, pour notre Salut et pour celui du monde ! 

 

On remarquera que les habitants de la ville ne s'adressent pas à Jésus; ils n'ont plus “besoin” de lui pour rendre témoignage car ils ont reçu l'eau vive; c'est par contre au premier témoin, à la samaritaine qu'ils rendent témoignage, à celle qui n'était rien et qui est désormais tout !

 

Que sont-ils devenus ? Nul ne le sait.... Néanmoins, c'est à Samarie que Philippe annonça avec un grand succès la parole de la Bonne Nouvelle (Ac 8, 4-25) : Les foules unanimes s’attachaient à ses enseignements, car tous entendaient parler des signes qu’il opérait, ou les voyaient (Ac 8, 6).


suite et fin sur Jésus et la Samaritaine (9)  

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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 08:34

Suite de Jésus et la Samaritaine (8)
Pour revenir au début de l'étude : Jésus et la Samaritaine (1)

En guise de conclusion

 

Ce texte est un appel aux  nations, à tous les peuples, à tous les hommes. Il est la sublimation de l'adresse à tous à reconnaître Dieu de Sophonie  (So 2, 3), du pardon divin offert à tous par Jonas  (Jon 3, 10). Il est l'appel à la vie éternelle et à la connaissance du Père et du Fils de  [Jn 17, 3], tout comme il est l'appel à la mission universelle de [Mt 28, 19-20].... Il est aussi, par la combinaison des faits et des étapes vers la compréhension du mystère du Christ, une prédication révolutionnaire pour le monde de l'époque : il est une adresse aux nations, un appel à l'unité de toute l'humanité dans la miséricorde du Père qui nous accueille tous réconciliés, quels qu'aient été nos actes antérieurs, comme Jésus a voulu nous le faire comprendre au travers de la parabole du fils prodigue (Lc 15), fils prodigue qui est notre propre reflet... Après l'Incarnation, Dieu n'est plus un Dieu jaloux, et les Juifs ne peuvent plus être jaloux de leur relation avec Dieu car Dieu lui-même l'a ouverte à tous (Mt 28, 19-20), car Dieu s'adresse désormais à tous les hommes, comme Jésus s'est révélé à la Samaritaine. Le texte que nous venons d'étudier est donc narration de l'un des événements les plus importants de l'Évangile !

 

Finalement, le long cheminement hésitant, rempli d'interrogations de la Samaritaine est l'image de notre propre cheminement vers la Révélation du message divin. La Samaritaine est le miroir de notre propre vie, de nos doutes, de nos interrogations, mais aussi celui de notre foi qui doit aboutir à notre total abandon  à Dieu,  à son  mystère, à sa joie et à  son amour.  La Samaritaine ? c'est moi ! c'est toi ! c'est nous ! Le  Nous savons que c’est vraiment lui le sauveur du monde du verset 42 est la première Profession de Foi, la première partie du Kérygme : Jésus Christ, Vrai Dieu et Vrai Homme, Sauveur du Monde et Ressuscité, même si celui-ci ne sera formulé de manière parfaite qu'après la mort et la résurrection de Notre Seigneur Jésus Christ ! On pourrait rapprocher ce verset du deuxième sacrement de l'initiation chrétienne : la confirmation, car les samaritains sont, au contact de Jésus, renforcés dans leur foi nouvelle.

 

C'est en fait tout ce passage de la Bible qui renvoie aux sacrements puisque l'on peut y retrouver la démarche baptismale, le désir de la confirmation , mais aussi l'expression du pardon : trois sacrements dans un seul texte ! La rencontre entre Jésus et la samaritaine est en fait l'un des événements les plus importants du Nouveau Testament, car il est ouverture à la prédication et à l'évangélisation des nations, nations qui avaient été séparées après l'épisode de Babel (Gn 11, 1-9). Cette ouverture sera achevée à la Pentecôte :  alors qu'à Babel Dieu avait brouillé les langues, faisant des hommes ne communiquant plus, impliquant une Alliance avec un Peuple élu, à Pentecôte tous les peuples ont été à nouveau unis en une seule Alliance, Dieu parlant par les disciples à chacun qui l'entend dans sa langue; Pentecôte signifie que Dieu est toujours présent avec nous et en nous, d'une manière spirituelle, nous apportant foi et force pour annoncer le message des Évangiles et vivre l'amour de Dieu dans le monde  (Ac 2, 1-41). La confirmation - qui commence à apparaître dans l'épisode de la Samaritaine - est donc d'une certaine manière notre Pentecôte personnelle qui fait de nous des disciples de Jésus par la grâce de l'Esprit Saint fortifiant notre foi.

 

__________________________________________________________________________

 

Les sources principales utilisées auront été :

Augustin (Saint), Homélies sur l'Évangile de Jean (I-XVI), Études Augustiniennes, Paris, éd. 1983, coll. Œuvres de Saint Augustin, 9ème série, vol. 71 (éd. bilingue latin/français) [Johan. ev. tract.]

von Balthasar (H.-U.), La Gloire et la Croix. 3. Théologie : ** Nouvelle Alliance, Desclée de Brouwer, Paris, 1990, nvlle. éd., coll. Théologie, n° 83 (trad. de l'allemand)

Bossuyt (Ph.) sj, L'Esprit en Actes, Éd. Lessius, Bruxelles, 1998, coll. Le livre et le rouleau, n° 3

Catéchisme de l'Église catholique, Centurion/Cerf/Fleurus-Mame, Paris, 1998, éd. définitive [CEC]

CIB Maredsous, Dictionnaire encyclopédique de la Bible, Brepols, 1987

Denzinger (H.), Symboles et définitions de la foi catholique, Cerf, Paris, 1996, 37ème éd. [DS]

Flavius Josèphe, La guerre des juifs, Éd. de Minuit, Paris, 1977 [GJI]

Guillet (J.) sj éd., Jésus Christ dans l'Évangile de Jean, Cerf, Paris, 1980, Cahiers Évangile, n° 31

Léon-Dufour (X.) sj, Lecture de l'Évangile selon Jean, Seuil, Paris, 1988, tome 1

Marchadour (A.), L'Évangile de Jean, Bayard Éd./Centurion, Paris, 6ème éd., 1992

Sagne (J.-Cl.), Traité de théologie spirituelle, Mame/Éd. de l'Emmanuel, Paris, 1995, nvlle. éd.

Tassin (Cl.), L'Évangile de Matthieu, Bayard Éd./Centurion, Paris, 4ème éd., 1991

Thabut (M.-N.), L'intelligence des Écritures, Éd. Soceval, Châteaufort, 1999, pp. 164-166

Thomas d'Aquin op, Commentaire sur l'Évangile de Saint Jean, Cerf, Paris, 1998, tome I [Com. Johan.].

Waldenfels (H.) sj, Manuel de théologie fondamentale, Cerf, Paris, 1997, nvlle. éd., coll. Cogitatio Fidei, n° 159 (trad. de l'allemand)

 

__________________________________________________________________________

 

Annexe : les verbes utilisés

 

Idée du verbe

vv. 1-6

vv. 7-15

vv. 16-19

vv. 20-26

vv. 27-38

vv. 39-42

Nombre total de verbes

Don

3

8

 

 

4

1

16

Connaissance

1

2

1

7

6

2

19

Nourriture*

 

9

 

 

4

 

13

Dialogue

1

7

5

6

12

3

34

Mouvement

4

8

2

10

14

3

41

Foi

 

 

 

8

3

5

16

Autres

8

4

5

7

9

2

35

* y compris spirituelle

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7 janvier 2010 4 07 /01 /janvier /2010 15:32

Epître de Jude (Jd ou Jude)

Impossible à déterminer, si ce n’est entre 50 et 100

?

De Palestine ou d’Alexandrie, cette dernière hypothèse étant minoritaire

Des chrétiens dans la mouvance des Eglises de Jérusalem et de Palestine et pour qui les frères de Jésus sont les seuls maîtres faisant autorité

Impossible à déterminer. Si pseudo-épigraphique, un homme pour qui les frères de Jésus sont les maîtres faisant autorité

Non contestée

Evangile de Jean (Jn)

80/110

Selon la tradition, Jean fils de Zébédée

Plus vraisemblablement un homme ou une école d’écrivains d’inspiration johannique

Dans la région d’Ephèse, même si certains, minoritaires, optent pour la Syrie

Tous les chrétiens

Un texte révisé par une seconde main, puis avec des additions entre 100 et 110

Non contestée, même si le chapitre 21 et 1, 1-18 semblent être des additions, alors que l’épisode de la femme adultère manque dans beaucoup de manuscrits anciens

Première épître de Jean (1Jn)

Après Jn, donc vers 100

Un auteur de la tradition johannique, mais en aucun cas le rédacteur de l’essentiel de Jn

?

Les chrétiens d’une communauté johannique où un schisme vient d’avoir lieu

Composition unitaire

L’incise trinitaire de (5, 6-8) est une glose théologique latine apparue à la fin du troisième siècle ou au début du quatrième siècle

Deuxième épître de Jean (2Jn)

Après Jn, donc vers 100

Un auteur de la tradition johannique, également auteur de 3Jn, et peut-être de 1Jn

?

Les chrétiens d’une communauté johannique menacés par l’arrivée de missionnaires sécessionnistes

Non contestée

Non discute

Troisième épître de Jean (3Jn)

Peu après 100

Un auteur de la tradition johannique, également auteur de 2Jn, et peut-être de 1Jn

?

Gaius, un chrétien johannique, envers lequel une communauté voisine se montre inamicale

Non contestée

Non contestée

Evangile de Luc Lc)

85 à cinq ou dix ans près, dans tous les cas après 70

D’après la tradition, Luc, médecin et compagnon de Paul.

Dans tous les cas, un hellénophone cultivé ayant connu Paul, connaissant très bien les Ecritures juives en grec, mais d’origine non juive, non palestinien, et non témoin direct du ministère de Jésus

?

A des communautés chrétiennes issues du paganisme et vivant en milieu grec concernées par les missions de Paul, vraisemblablement dans un grec très littéraire

Non contestée

Certains passages importants ne se retrouvent pas dans les manuscrits grecs occidentaux, tout en étant par contre présents dans les manuscrits grecs orientaux de la même époque

Evangile de Marc (Mc)

60/75, plus probablement 64/69, car Pierre était vivant au début de sa rédaction,  mais très vraisemblablement avant la destruction du Temple de Jérusalem..

Dans tous les cas, antérieur à Mt et à Lc

Selon la tradition, Marc, disciple de Pierre dont il aurait recueilli le témoignage à Rome, donc entre 64 et 66.

Dans tous les cas un hellénophone non témoin du ministère de Jésus et connaissant mal la géographie de la Palestine

Vraisemblablement à Rome

Des communautés non juives d’origine, hors de Palestine et ayant connu des persécutions et des défaillances, dans une langue populaire et proche des traditions orales

Non contestée

Un texte issu du témoignage de Pierre et de traditions orales et écrites préétablies.

Un texte qui semble avoir fait l’objet d’un travail rédactionnel assez long. La finale (16, 9-20) semble avoir été rajoutée postérieurement, même si elle est canonique

Evangile de Matthieu (Mt)

80/90 à une décennie près, dans tous les cas après 70

Selon la tradition, l’Apôtre Matthieu.

Dans tous les cas, un hellénophone judéo-chrétien connaissant l’hébreu et l’araméen, mais non forcément témoin direct du ministère de Jésus

Vraisemblablement à Antioche

Tous les chrétiens, mais plus particulièrement une communauté chrétienne issue du judaïsme et vivant en Palestine

Non contestée

Non contestée

Utilisation de nombreux témoignages, de Mc, de la source Q (collection disparue des paroles de Jésus) et des traditions orales et écrites disponibles

Première épître de Pierre (1P)

60/63 si de Pierre

70/90 si pseudonyme

Saint Pierre ou un disciple de Pierre perpétuant son message à Rome

Rome

Une région d’Asie mineur évangélisée par des missionnaires venus de Jérusalem

Vraisemblablement un disciple de Pierre

Pourrait être la réunion de deux documents

Deuxième épître de Pierre (2P)

Vers 130 à une décennie près, même si la tendance actuelle est de revenir en arrière, vers 100

Inconnu

De Rome (opinion majoritaire, sinon d’Alexandrie ou d’Asie mineure

A tous les chrétiens de la Méditerranée orientale connaissant les écrits pauliniens et 1P

Pseudonyme par quelqu’un voulant transmettre un ultime message avec des conseils tirés d’une proximité réelle avec Pierre

Non contestée

Epître aux Philippiens (Ph)

Vers 56 (61/63 ou 58/60 selon certains)

Paul de Tarse

D’Ephèse si 56, sinon Rome ou Césarée

Aux chrétiens de Philippes évangélisés par Paul vers 50

Non contestée

Non contestée

Epître à Philémon (Phm)

Vers 55 (58/60 ou 61/63 selon certains)

Paul de Tarse

D’Ephèse si 56, sinon Césarée ou Rome

A Philémon et à son épouse Archippe et à l’Eglise se rassemblant dans leur maison

Non contestée

Non contestée

Epître aux Romains (Rm)

Hiver 57 ou 58

(55/56 selon certains)

Dans tous les cas, postérieure à (Ga)

Paul de Tarse

Corinthe

A des amis de Rome appartenant à une communauté judéo-chrétienne que Paul n’a encore jamais rencontrée

Non contestée

Doutes sur 16, 25-27, car assez lointain de la forme paulinienne habituelle pour conclure ses épîtres.

Rejet par certains des chapitres 9 à 11 jugés non paulinien, mais ceci n’est pas admis tant par Vatican II que par le CEC.

suite de Datation des Evangiles (2)  à suivre sur Datation des Evangiles (4)
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7 janvier 2010 4 07 /01 /janvier /2010 15:32

Première épître aux Thessaloniciens (1Th)

50/51 (41/43 selon certains)

Paul de Tarse

Corinthe

Aux chrétiens de Thessalonique, tant d’origine juive que gentille

Non contestée

Une minorité estime que (5, 1-11) pourrait être un rajout

Accueil de l’Evangile

Admonitions éthiques et exhortations

Parousie

Vie de l’Eglise

Didachè, Ignace d’Antioche, Hermas :

2, 7 ; 4, 16 ; 5, 13 ; 5, 16

Deuxième épître aux Thessaloniciens (2Th)

51/52 si de Paul

Fin du premier siècle si pseudonyme

Paul de Tarse ou un pseudonyme

Corinthe si Paul

Si pseudonyme, inconnu

A  l’Eglise de Thessalonique

Une légère majorité se dégage pour ne plus l’attribuer à Paul

Non contestée

La parousie

Le salut

Didachè, Polycarpe, Hermas :

1, 4 ; 1, 12 ; 2, 9 ; 3, 15

Première épître à Timothée (1Tm)

Vers 65 si de Paul

Vers la fin du premier siècle si pseudonyme

Paul de Tarse ou l’un de ses disciples ou l’un de ses commentateurs

En Macédoine si Paul, sinon inconnu

Timothée (à Ephèse)

Une forte majorité se dégage pour une rédaction par un disciple de Paul

Non contestée

Les faux docteurs

Organisation de la prière

Evêques et diacres

Veuves, presbytres et esclaves

Lutte contre l’amour de l’argent

Didachè, Ignace d’Antioche, Polycarpe, Martyre de Polycarpe, A Diognète :

1, 1 ; 1, 3 ; 1, 5 ; 2, 6 ; 3, 16 ; 5, 18 ; 6, 3 ; 6, 7 ; 6, 10 ; 6, 16

Deuxième épître à Timothée (2Tm)

64 si de Paul

Vers la fin du premier siècle si pseudonyme

Paul de Tarse ou un disciple de Paul

De Rome si de Paul, qui est alors emprisonné, sinon inconnu

Timothée (à Troas ou à Ephèse)

Probablement par un disciple ou un commentateur de Paul à partir de souvenirs historiques

Non contestée

Prédication de l’Evangile

Vrai et faux enseignement

Recommandations pratiques et appel à la prudence

Pseudo-Clémet, Ignace d’Antioche, Polycarpe, Pseudo-Barnabé, Hermas :

2, 4 ; 2, 8 ; 2, 12 ; 4, 1 ; 4, 6-8 ; 4, 10

Epître à Tite (Tt)

Vers 55 si de Paul

Fin du premier siècle si pseudonyme

Paul de Tarse ou l’un de ses disciples ou l’un de ses commentateurs

?

Tite (en Crète)

Vraisemblablement non paulinienne

Non contestée

La structure de l’Eglise

Les faux enseignements

Le comportement de la communauté et la foi

Clément de Rome, Pseudo-Barnabé, A Diognète :

1, 2 ; 3, 1 ; 3, 4-7

 

suite et fin de Datation des Evangiles (3)
retour au début de l'étude Datation des Evangiles (1)

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7 janvier 2010 4 07 /01 /janvier /2010 15:12

  suite de Datation des Evangiles (1)

 

Quand, du moins pour le texte écrit ?

Qui ?

D’où ?

A qui ?

Authenticité

Intégrité

Contenu

Similitudes avec les Pères Apostolique

Actes des Apôtres (Ac)

85 à cinq ou dix ans près

D’après la tradition, Luc, médecin et compagnon de Paul.

Dans tous les cas, un hellénophone cultivé ayant connu Paul, connaissant très bien les Ecritures juives en grec, mais d’origine non juive, non palestinien, et non témoin direct du ministère de Jésus

?

Aux Eglises concernées par les missions de Paul, vraisemblablement dans un grec très littéraire

Non contestée

Manuscrits occidentaux en grec avec beaucoup de passages en plus que les manuscrits orientaux

La préparation des disciples à la venue de l’Esprit

Missions à Jérusalem en Samarie et en Judée

Mission de Barnabé et de Paul pour la conversion des Gentils

Concile de Jérusalem sur la dite conversion

Missions de Paul

Didachè, Clément de Rome, Pseudo-Clément, Ignace d’Antioche, Polycarpe, Hermas, A Diognète :

1, 6 ; 1, 25 ; 2, 24 ; 2, 38 ; 10, 15 ; 10, 35 ; 10, 42 ; 10, 48 ; 13, 22 ; 14, 14 ; 14, 16 ; 15, 17-18 ; 15, 29 ; 17, 24-25 ; 17, 30 ; 19, 5 ; 20, 28 ; 20, 33-35

Apocalypse (Ap)

Entre 92 et 96, dans tous les cas à la fin du règne de Domitien

Un prophète judéo-chrétien qui n’est ni l’Apôtre, ni l’auteur de l’Evangile et des Epîtres

?

Aux sept Eglises de l’Asie mineure occidentale

Non contestée

Pourrait être la réunion de deux apocalypses

Inclusions de passages et de visions tirées de la tradition apocalyptique chrétienne

La cour céleste

Le dragon, les bêtes et l’Agneau

Les fléaux

Le jugement de Babylone

La victoire du Christ et la fin de l’histoire

Didachè, Clément de Rome, Ignace d’Antioche, Polycarpe, Hermas, A Diognète :

1, 16 ; 2, 23 ; 3, 7 ; 3, 11 ; 5, 13 ; 13, 2 ; 13, 13-17 ; 19, 20 ; 21, 2-3 ; 22, 12 ; 22, 20

Première épître aux Corinthiens

(1Co)

Fin 56 ou début 57

(54/55 selon certains)

Paul de Tarse

Ephèse

Une Eglise de Corinthe composée de Juifs et de Gentils convertis par Paul entre 42 et 52

Non contestée

Lettre composée en plusieurs étapes

Débat sur 13 et 14, 34-35

Les factions

Les comportements

Charismes et amour

La résurrection

Didachè, Pseudo-Clément, Ignace d’Antioche, Polycarpe, Martyre de Polycarpe, Hermas, A Diognète :

1, 20 ; 1, 23 ; 1, 25 ; 2, 9 ; 2, 14 ; 3, 9 ; 3, 16 ; 4, 4 ; 4, 10-14 ; 5, 6 ; 6, 2 ; 6, 9-10 ; 6, 19 ; 7, 11 ; 7, 22 ; 7, 3-40 ; 8, 1 ; 9, 1 ; 9, 7-15 ; 9, 24-27 ; 10, 25 ; 10, 28 ; 11, 1 ; 12, 16 ; 14, 2 ; 14, -9 ; 14, 25 ; 15, 25 ; 15, 32 ; 15, 50 ; 16, 22

Deuxième épître aux Corinthiens (2Co)

2ème semestre 57

(55/56 selon certains)

Néanmoins les emprunts faits par (Ga) font penser à une date qui pourrait être très légèrement antérieure ou égale à 54/55

 

Paul de Tarse

Macédoine

Une Eglise de Corinthe composée de Juifs et de Gentils convertis par Paul entre 42 et 52

Non contestée

Assemblage de diverses lettres

6, 14-7, 1 pourrait être une interpolation non paulinienne

Les faux apôtres

 

Ignace d’Antioche, Polycarpe, Hermas, A Diognète :

4, 4 ; 5, 1 ; 6, 7 ; 6, 9-10 ; 7, 10 ; 8, 21 ; 10, 3 ; 11, 9 ; 12, 13-16 ; 13, 11

Epître aux Colossiens (Col)

54/63 si de Paul

Années 80 si pseudonyme

On pencherait pour 61/62 ou plutôt 58/60, périodes où Paul est emprisonné

Vraisemblablement Paul de Tarse,

sinon Timothée

ou pseudonyme, mais ce serait illogique avec le contenu

Rome ou Ephèse ou Césarée  si de Paul

Ephèse si pseudonyme

Chrétiens de Colosses en Phrygie, évangélisés par Epaphras, et ayant informé Paul de leurs problèmes

Faible probabilité d’une écriture non paulinienne. Dans ce cas, l’auteur serait un disciple de Paul s’inspirant de Phm

Non contestée

Prédication du mystère

Seigneurie de Dieu

Pratique chrétienne

Didachè, Hermas :

3, 8

Epître aux Ephésiens (Ep)

60 si de Paul

Années 90 si pseudonyme

Paul de Tarse ou l’un de ses disciple

?

Des chrétiens pauliniens d’Asie mineure

Probablement un disciple de Paul s’inspirant de Col et des lettres authentiques de Paul

Non contestée, sauf l’adresse à Ephèse de 1, 1

Louange à Dieu

Activité salvifique et vivifiante de Dieu

Unité, pastorale, mode de vie, code domestique

Marcher en enfants de lumière

S’armer au combat contre le mal, notamment par la prière

Didachè, Pseudo-Clément, Ignace d’Antioche, Polycarpe, Hermas :

1, 20-23 ; 2, 5 ; 2, 8-9 ; 3, 8-9 ; 4, 4-6 ; 4, 22-24 ; 4, 26 ; 4, 29-30 ; 5, 1 ; 5, 21 ; 5, 25-29 ; 6, 1 ; 6, 5 ; 6, 9 ; 6, 13

Epître aux Galates (Ga)

54/55, voire 57 au maximum

Les hypothèses laissant supposer une écriture avant 48 sont assez peu vraisemblables.

Paul de Tarse

D’Ephèse si 54/55, sinon de Macédoine

Des Eglises autour d’Ancyre évangélisées par Paul en 50 et visitées par lui en 53, contestées par des judaïsants voulant imposer à ces helléno-chrétiens une stricte observance de la Loi et la circoncision

Non contestée

Non contestée

Réponse à des anathèmes

Justification par la foi et non par la Loi

Egalité entre les chrétiens

Liberté et invitation à marcher selon l’Esprit

Didachè, Pseudo-Clément, Ignace d’Antioche, Polycarpe, A Diognète :

1, 1-2 ; 1, 12 ; 3, 28 ; 4, 4 ; 5, 7 ; 5, 17 ; 5, 19-21 ; 6, 2 ; 6, 7

Epître aux Hébreux (He)

Vraisemblablement entre 66 et 69, peut-être même avant puisqu’il n’y est pas question de la guerre juive entamée en 66.

Dans tous les cas, avant 70 puisque le culte au Temple est toujours en activité (9, 9).

 

Non spécifié

D’Italie

Soit à des chrétiens de Rome attirés par un retour au culte juif, soit à des judéo-chrétiens réfugiés en Palestine, en Syrie ou en Egypte pour fuir les persécutions du judaïsme officiel

Auteur non identifié, l’attribution à Paul, aujourd’hui abandonnée, ayant de plus été assez  tardive

Non contestée

Supériorité de Jésus en tant que Fils de Dieu

Sacerdoce et sacrifice de Jésus

Foi et endurance

Injonctions sur la pratique

Clément de Rome, Polycarpe, Martyre de Polycarpe, Hermas, A Diognète :

1, 3-4 ; 3, 2 ; 3, 4 ; 11, 3 ; 11, 10 ; 11, 33 ; 12, 10 ; 12, 28 ; 13, 24

Epître de Jacques (Jc)

62 après la mort de Jacques, dans la fourchette 70/110, vraisemblablement 80/95

Un disciple de Jacques l’admirant comme l’autorité chrétienne la plus loyale envers le judaïsme

?

Diatribe à des chrétiens hors de Palestine issus de la diaspora et restant conservateurs quant à leur appréciation du judaïsme

Un disciple de Jacques

Non contestée

Epreuves et tentations

La loi, la foi et les œuvres

La langue et la sagesse

Les désirs

La justice

L’argent

La patience

Hermas :

1, 5-6 ; 1, 27 ; 2, 7 ; 4, 11-12 ; 5, 4


 à suivre sur Datation des Evangiles (3)
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7 janvier 2010 4 07 /01 /janvier /2010 12:18

Les dates extrêmes généralement admises quant à la rédaction des livres du Nouveau Testament sont les suivantes :




30/33 Mort et Résurrection de Jésus
41/51 Première épître aux Thessaloniciens
50/100 Epître de Jude
51/100 Seconde épître aux Thessaloniciens
54/57 Epître aux Galates
54/57 Première épître aux Corinthiens
55/57 Deuxième épître aux Corinthiens
54/80 Epître aux Colossiens
55/58 Epître aux Romains
55/63 Epître à Philémon
56/63 Epître aux Philippiens
60/80 Epître aux Hébreux
60/90 Première épître de Pierre
60/90 Epître aux Ephésiens
65/100 Epître à Tite
64/67 Seconde épître à Timothée
65/100 Première épître à Timothée
68/73 Evangile de Marc
70 Destruction du Temple de Jérusalem
70/90 Epître de Jacques
70/90 Evangile de Matthieu
80/90 Evangile de Luc
80/90 Evangile de Jean
80/90 Actes des Apôtres
90/96 Apocalypse
v. 100 Première épître de Jean
v. 100 Deuxième épître de Jean
v. 100 Troisième épître de Jean
120/130 Seconde épître de Pierre
v. 125 Papias d’Hiérapolis atteste de l’Evangile de Marc
avant 200 Irénée de Lyon atteste des Evangiles de Matthieu, de Luc et de Jean, et des lettres de Paul et de Pierre


 

Les dates données sont celles les plus communément admises par les historiens, y compris non catholiques et athées. Je les ai données volontairement car, malgré tout le désir de certains de nier l’historicité du Nouveau Testament, elles montrent bien que le dit Nouveau Testament était déjà quasiment entièrement composé avant la fin du premier siècle, puisque ces dates sont celles admises y compris par les historiens athées ou anticléricaux ! C’est donc une preuve, négative reprenant les arguments de l’adversaire, de l’ancienneté des textes néotestamentaires. C’est pourquoi, même si je ne suis pas d’accord avec ces dates, je les ai volontairement reprises ! Personnellement, après lectures, comparaisons, analyses, écoute, etc…, je pense que les trois synoptiques sont antérieurs à 70. Quelques éléments de démonstration…

Ainsi, la rédaction de Luc semble s’inscrire entre 64 et 70, voire même avant 64. Or, Luc dépend de Marc, ce qui implique que Marc a dans tous les cas été composé avant 64. Par ailleurs, comme les Pères et beaucoup d’historiens affirment que Matthieu est le premier à avoir été composé, Marc en dépendant partiellement et tous les écrits des Pères Apostoliques y baignant, voire s’y référant (Clément de Rome, Lettre, 46, 7-8 ; Pseudo-Barnabé 4, 14 ; Didaché 8, 2), y compris clairement, Matthieu aurait donc été composé avant 60. Maintenant, certains posent Marc antérieur à Matthieu… Et bien alors, Marc aurait été composé avant 60 et Matthieu avant 64 ! Quel que soit le sens et les relations prises, on n’en sort pas : 64/70 pour Luc, et, au pire du pire 68 et 69 pour les deux autres !

Par ailleurs, il est admis que Pierre était encore vivant au moment de la rédaction de Marc ! Donc, l’Evangile de Marc est au maximum datable de 66, l’année admise pour la mort de Pierre ! Et Matthieu, dans l’hypothèse pré-Marc daterait au moins de 64/65, et dans la post-Marc de 67/69 !

Pour ce qui est de l’Evangile de Jean, toujours est-il déjà qu’il y a de nombreux contacts avec Ignace d’Antioche (notamment in : Philadelphiens et Romains) ou encore avec les Odes de Salomon, donc des textes de la première moitié du II° siècle au plus. Donc, déjà, dans tous les cas de figure une rédaction avant 100, voir même 100. De plus, le Papyrus Egerton 2 et le Papyrus Rylands 457 montrent que dès le début du II° siècle le texte de Jean était bien connu dans toute l’Egypte. Cela nous ramnène donc au moins à 90 au plus tard pour la rédaction de tout le corpus. Si l’on admet qu’il y a eu des retouches et des corrections du texte, nous sommes bien obligés d’admettre au moins 88 comme limite supérieure de rédaction. Mais comme divers indices, que je ne reprends pas ici, me montrent que les 1ère et 2ème épîtres de Jean sont postérieures à l’Evangile de Jean, et comme elles ont été écrites, selon les constats que je fais, au moins avant 85, cela signifie que l’Evangile de Jean est écrit au plus tard en 80 ! Et je ne parle même pas du estine, qui est bien présent de l’indicatif et en aucun cas parfait ou aoriste, de (Jn 5, 2), ce qui tendrait à démontrer que l’Evangile de Jean serait antérieur à la destruction du Temple, donc à 70 !

Par ailleurs, il est surprenant de lire que l’on admet sans aucune réserve ce que dit Eusèbe de Césarée sur Josèphe, Plotin, Tertullien, etc…, y compris lorsqu’il en cite des extraits ou parle de leur époque, de leurs ouvrages, etc…Donc, pourquoi admettre qu’il a raison lorsqu’il parle d’auteurs non chrétiens ou d’un auteur devenu hérétique, mais qu’il a tort lorsqu’il parle de Luc, de Matthieu, de Jean, de Marc ? C’est rien moins qu’absurde !

Enfin, si les Evangiles étaient des textes trafiqués, voire forgés par l’Eglise pour asseoir son pouvoir, pourquoi avoir dès lors laissé subsister des passages tels que (Mt 24, 34), (Mc 13, 30) ou (Lc 21, 32) qui pourraient démontrer que Jésus s’est trompé en prenant une lecture littérale et non spirituelle ? Prenons comme date de la mort du Christ 33. A cette époque, une génération était, selon les conceptions les plus larges entre 30 et 40 ans. Cela signifie donc que ces trois Evangiles ont été écrits avant 70 et au plus entre 63 et 73, date limite supérieure ! Mais si l’on prend la tradition juive du mariage idéal à 18 ans (cf. M Avot V, 21), on peut dire qu’une génération était d’environ 20 ans ! Donc, 33 + 20 = 53 au plus pour Luc, 52 pour Marc et 51 pour Matthieu !

Enfin, je ne parle ici que de la composition écrite des Evangiles, pas de leur composition orale qui a pu très bien être, vue la société chrétienne et les persécutions (la date de 64 pouvant elle-même former une limite supérieure de composition du fait de ces persécutions), bien antérieure !

De toute manière, il est rigolo de lire chez certains adversaires que la composition écrite tardive a été faite à partir de témoignages oraux, donc antérieurs, lointains, voire de logia reprenant les paroles de Jésus, composées de Son vivant ! Ces Evangiles seraient donc des résumés ou des reprises de textes écrits … avant 33, voir avant 30 selon la date prise pour la mort du Christ en Croix ! Sans le vouloir, ils ont repoussé encore plus loin l’ancienneté, non forcément des Evangiles, mais de leur contenu ! Avec les tremblements de terre de Jérusalem et de Rome ou encore de Grèce et d’Anatolie, les persécutions de toutes sortes, les invasions de toutes sortes, les pillages de toutes sortes, les oublis dans un coin de bibliothèque du désert, les autodafés antichrétiens, la négligence des hommes, l’action du temps sur des supports fragiles, etc.. il n’est pas forcément illogique que ces aide-mémoire aient disparu, tout comme il ne serait pas illogique de retrouver la trace de l’un d’eux un jour par hasard !

Nie t-on certains dialogues de Platon parce que leurs manuscrits ne sont pas de son temps, parce qu’ils datent pour certains de plus de 500 ans après leur rédaction, parce que leur connaissance antérieure n’est connue que par quelques fragments postérieurs de quelques années ? Non ! Et d’ailleurs, est-ce pour autant que l’on qualifie des fragments de logia ? Nie t-on Socrate alors qu’il n’a rien écrit et n’est connu que par des témoins ? Alors, pourquoi les mêmes traitent-ils Jésus avec moins d’égards que Socrate et Platon ? Les mêmes pseudo-arguments scientifiques appliqués au Christ et aux Apôtres pourraient pourtant très facilement leur dénier toute réalité et tout enseignement, uniquement en substituant dans leurs écrits Socrate au Christ, Platon aux Apôtres et aux Evangélistes, Aristote aux Pères Apostoliques et … Onfray au Père Lagrange !

Quant aux théories des diverses sources pour justifier les similitudes des Synoptiques, je ne suis pas forcément convaincu, car on en oublie toujours et systématiquement une pourtant majeure à mes yeux et qui à elle seule justifie et explique toutes les similitudes : le Christ Lui-même, vivant, parlant directement !

Notons maintenant autre chose… On constate que tant les Juifs que les Chrétiens se sont attachés, à partir du milieu du premier siècle, à mettre par écrit des traditions jusqu’alors orales, ce mouvement s’intensifiant tout au long du deuxième siècle.  Certes ce mouvement, qui se prolongera en fait pendant quatre ou cinq siècles, a véritablement été lancé à partir de la chute du Temple, mais il avait été entamé un peu plus tôt par certains conscients des risques encourus par la communauté juive de Palestine du fait des tensions avec l’Empire romain, ainsi que de l’existence d’une diaspora pas toujours fidèle à la tradition palestinienne. Donc, le phénomène de diaspora avait entraîné un processus de transposition de l’oral à l’écrit, ce phénomène étant amplifié par la perte de tout centre avec la chute du Temple. Ce phénomène allait être identique chez les Chrétiens dès lors que la mission dépassa le simple cadre de la judaïté pour s’ouvrir aux Gentils, le besoin de documents écrits, même s’il s’agissait uniquement parfois que de transcrire matériellement des connaissances jusqu’alors orales, répondant à la fois à un besoin d’exactitude face aux risques de divergences et à des nécessités liées à la culture des Gentils, bien plus écrite qu’orale, que ce soit chez les Latins ou chez les Grecs, ces désignations devant ici s’entendre aux sens culturels et civilisationnels les plus larges. Il y a donc eu un mouvement parallèle de mise par écrit dès la naissance du Christianisme post-christique, intensifié par la menace puis la chute du Temple, ainsi que par la concurrence entre le Judaïsme et le Christianisme, chacun voulant bien mettre en évidence ses divergences d’avec l’autre. Au milieu du premier siècle, tant les Juifs que les Chrétiens sont passés, du fait de la diaspora d’un côté et de l’ouverture aux Gentils de l’autre, de traditions et de pratiques orales à la fixation de ces traditions en des écrits et des collections d’écrits ! Mais il est évident que ces passages se sont traduits chez les uns comme chez les autres par des processus de sélection, ce qui n’empêcha pas la conservation dans d’autres livres moins officiels d’autres éléments ; ce seront les Baraytôt, les extérieurs par rapport à la Misnhâh, les écrits apocryphes par rapport au Nouveau Testament ! Diaspora, ouverture au monde, prosélytisme, résistance à la persécution, concurrence entre ont conduit tant le Judaïsme que le Christianisme issues d’une même souche, d’un même lieu et d’une même tradition, et confrontés aux mêmes problèmes, à mettre par écrit ce qui n’était jusqu’alors qu’oral, certes en sélectionnant, mais jamais en modifiant ce qui était jusqu’alors, je me répète, oral.

Pour enfin dire quelques mots sur les apocryphes chrétiens, tous ne sont cependant pas orthodoxes. Il y a des écrits anciens judéo-chrétiens qui sont théologiquement admissibles dans leurs grandes lignes (toute une partie de l’Evangile de Pierre), des pieuses fictions presque toujours orthodoxes mais laissant trop de part au merveilleux (par exemple le Protévangile de Jacques), mais aussi des écrits clairement hétérodoxes et hérétiques (docétisme de l’Evangile de Pierre, encratisme des Actes de Paul et de Thècle, gnosticisme de l’Evangile de Thomas, rejet du Dieu des Juifs et le Dieu séparé de l’Evangile de Marcion, etc…). Ce sont de précieux témoignages, parfois des aides, mais il faut les approcher avec prudence car ils oublient souvent la substance de la Bonne Nouvelle ! Par ailleurs, la rédaction de ces textes est toujours  postérieure au premier siècle, s’échelonnant jusqu’au VII° siècle, voire même jusqu’au XX° avec l’Evangile d’André créé de toutes pièces par des ennemis du Catholicisme ! Ainsi, si certains sont théologiquement justes, ils ne peuvent pas être confondus avec le canon, parce que le critère de sélection majeur a été, outre la fidélité à la Parole, l’ancienneté, donc la proximité avec le Christ ou ses témoins réels et immédiats ! L’une des explications de l’actuelle volonté de certains à reculer les dates de rédaction des textes du Nouveau Testament tient justement en une volonté d’introduire la confusion avec ces apocryphes afin de justifier par ce moyen leurs propres doutes ou attaques contre le Christianisme, afin de faire croire qu’une sélection infondée aurait été faite ! Pour conclure, ne pas confondre les apocryphes et les Agrapha

Evoquons maintenant les Pères Apostoliques… Les Pères Apostoliques se sont axés sur la parénèse – qui est une forme de la prédication consistant en une exhortation à caractère moral ou social, et visant au suivi d’une attitude de vie chrétienne -, la liturgie, la catéchèse, la mission et la lutte contre les hérésies, fondant ainsi la dogmatique. Ceci explique pourquoi il y a peu de références à la vie de Jésus. Je rappelle que les Pères Apostoliques sont Clément de Rome (fin du premier siècle), Ignace d’Antioche (mort vers 107), Polycarpe de Smyrne (né dans la seconde moitié du premier siècle), Papias d’Hiérapolis (vivant en 130), Hermas (écrit vers 140), ainsi que les auteurs de la Didachè (seconde moitié du premier siècle), de l’Homélie du II° siècle, du Martyre de Polycarpe, de l’Épître de Barnabé et du À Diognète (deuxième ou tout début du troisième siècle). Or, voici les passages du Nouveau Testament avec lesquels ils ont, pour le moins, des similitudes :

(Mt) 3, 7 ; 3, 15 ; 3, 17 ; 5, 3 ; 5, 10 ; 5, 22-26 ; 5, 32-33 ; 5, 39-42 ; 5, 44-47 ; 6, 5 ; 6, 9-16 ; 6, 24 ; 7, 1-2 ; 7, 6 ; 7, 12 ; 7, 21 ; 8, 17 ; 9, 12-13 ; 10, 10 ; 10, 22 ; 10, 28 ; 10, 32 ; 10, 40 ; 12, 31 ; 12, 33 ; 12, 50 ; 13, 20 ; 13, 22 ; 13, 39 ; 15, 13 ; 15, 19 ; 16, 26-27 ; 17, 5 ; 18, 3 ; 18, 15-35 ; 19, 8-9 ; 19, 12 ; 19, 17-18 ; 19, 30 ; 20, 16 ; 20, 28 ; 21, 9 ; 21, 15 ; 21, 22 ; 21, 37 ; 22, 14 ; 22, 37-39 ; 22, 42-45 ; 23, 8 ; 24, 4 ; 24, 10 ; 24, 13 ; 24, 24 ; 24, 30-31 ; 24, 42-44 ; 25, 13 ; 26, 24 ; 26, 31 ; 26, 55 ; 26, 64 ; 27, 34-48 ; 28, 18-19

(Mc) 1, 37 ; 2, 17 ; 3, 35 ; 4, 18-19 ; 6, 52 ; 7, 6 ; 9, 47 ; 9, 50 ; 10, 11 ; 10, 23 ; 10, 45 ; 12, 37 ; 14, 21

(Lc) 1, 75 ; 4, 18-19 ; 6, 9 ; 6, 20 ; 6, 27-38 ; 8, 21 ; 9, 24 ; 10, 3 ; 10, 21-22 ; 12, ; 12, 29 ; 12, 35 ; 12, 42 ; 13, 14-16 ; 14, 3-5 ; 16, 10-13 ; 17, 2 ; 17, 33 ; 20, 17 ; 20, 41

(Jn) 1, 7 ; 1, 18 ; 3, 3-8 ; 3, 17 ; 4, 10 ; 5, 19 ; 5, 30 ; 6, 33 ; 7, 38 ; 7, 42 ; 8, 28-29 ; 10, 7 ; 10, 9 ; 10, 18 ; 12, 25 ; 12, 31 ; 12, 49 ; 13, 20 ; 13, 31 ; 14, 6 ; 14, 12 ; 15, 10 ; 15, 18-19 ; 17, 11-16

(Ac) 1, 6 ; 1, 25 ; 2, 24 ; 2, 38 ; 10, 15 ; 10, 35 ; 10, 42 ; 10, 48 ; 13, 22 ; 14, 14 ; 14, 16 ; 15, 17-18 ; 15, 29 ; 17, 24-25 ; 17, 30 ; 19, 5 ; 20, 28 ; 20, 33-35

(Rm) 1, 3 ; 1, 29-32 ; 2, 4 ; 3, 25 ; 4, 3 ; 4, 11-12 ; 5, 17-19 ; 6, 4 ; 8, 5 ; 8, 12-13 ; 8, 32 ; 11, 33 ; 12,9 ; 12, 17 ; 13, 1 ; 14, 10-12 ; 15 ; 27 ; 16, 15

(1Co) 1, 20 ; 1, 23 ; 1, 25 ; 2, 9 ; 2, 14 ; 3, 9 ; 3, 16 ; 4, 4 ; 4, 10-14 ; 5, 6 ; 6, 2 ; 6, 9-10 ; 6, 19 ; 7, 11 ; 7, 22 ; 7, 3-40 ; 8, 1 ; 9, 1 ; 9, 7-15 ; 9, 24-27 ; 10, 25 ; 10, 28 ; 11, 1 ; 12, 16 ; 14, 2 ; 14, -9 ; 14, 25 ; 15, 25 ; 15, 32 ; 15, 50 ; 16, 22

(2Co) 4, 4 ; 5, 1 ; 6, 7 ; 6, 9-10 ; 7, 10 ; 8, 21 ; 10, 3 ; 11, 9 ; 12, 13-16 ; 13, 11

(Ga) 1, 1-2 ; 1, 12 ; 3, 28 ; 4, 4 ; 5, 7 ; 5, 17 ; 5, 19-21 ; 6, 2 ; 6, 7

(Ep) 1, 20-23 ; 2, 5 ; 2, 8-9 ; 3, 8-9 ; 4, 4-6 ; 4, 22-24 ; 4, 26 ; 4, 29-30 ; 5, 1 ; 5, 21 ; 5, 25-29 ; 6, 1 ; 6, 5 ; 6, 9 ; 6, 13(Ph) 1, 11 ; 2, 2 ; 2, 4 ; 2, 10 ; 2, 16-17 ; 3, 12-14 ; 3, 20-21 ; 4, 18

(Col) 3, 8

(1Th) 2, 7 ; 4, 16 ; 5, 13 ; 5, 16

(2Th) 1, 4 ; 1, 12 ; 2, 9 ; 3, 15

(1Tm) 1, 1 ; 1, 3 ; 1, 5 ; 2, 6 ; 3, 16 ; 5, 18 ; 6, 3 ; 6, 7 ; 6, 10 ; 6, 16(2Tm) 2, 4 ; 2, 8 ; 2, 12 ; 4, 1 ; 4, 6-8 ; 4, 10

(Tt) 1, 2 ; 3, 1 ; 3, 4-7

(He) 1, 3-4 ; 3, 2 ; 3, 4 ; 11, 3 ; 11, 10 ; 11, 33 ; 12, 10 ; 12, 28 ; 13, 24

(Jc) 1, 5-6 ; 1, 27 ; 2, 7 ; 4, 11-12 ; 5, 4

(1P) 1, 3 ; 1, 7-8 ; 1, 17 ; 1, 21 ; 2, 5-6 ; 2, 11-13 ; 2, 22 ; 2, 24 ; 3, 18 ; 4, 8 ; 4, 11 ; 4, 13 ; 4, 15-16 ; 5, 7

(2P) 1, 13 ; 2, 20

(1Jn) 1, 1 ; 2, 13-14 ; 2, 18 ; 3, 13 ; 3, 22 ; 4, 2-3 ; 4, 19

(Jude) 2, 25

(Ap) 1, 16 ; 2, 23 ; 3, 7 ; 3, 11 ; 5, 13 ; 13, 2 ; 13, 13-17 ; 19, 20 ; 21, 2-3 ; 22, 12 ; 22, 20

Tout ceci corrobore le contenu du Nouveau Testament et son ancienneté ! Autant de similitudes et de reprises en finalement très peu de pages !

Retenons pour finir les points suivants :

⒜ Jésus n’a rien écrit parce qu’il ne venait pas pour abolir la Loi, mais pour faire rentrer l’amour dans le cœur des hommes. Il était lui-même le témoignage et n’avait pas besoin d’écrire lui-même.

⒝ Le monde où vivait Jésus était, malgré les écrits existants, essentiellement oral.

⒞ Si les textes avaient été trafiqués, il est certain que les truqueurs auraient supprimé les passages gênants, notamment ceux relatifs à la fin des temps dans la génération même ayant connu le Christ.

⒟ Des sources écrites ont disparu, mais cela tient aux supports, aux persécutions, aux invasions, aux tremblements de terre, aux incendies, pas à une volonté de camoufler. De plus, on trouve par hasard des textes très anciens, soit dans des caches (suite des persécutions), soit dans des monastères qui ne savent même pas ce qu’ils ont dans leurs rayonnages !

⒠ On n'a plus le texte exact de la Loi romaine des XII Tables. Pourtant, personne ne met pour autant en doute leur existence et leur contenu !

Pour conclure, ce tableau de synthèse issu de travaux personnels (Datation des Evangiles (2) ) :

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16 décembre 2009 3 16 /12 /décembre /2009 08:00

Cet événement dont nous parle saint Marc (Mc 10, 46-52) est à mettre en parallèle avec la rencontre entre Jésus et la samaritaine. Le lieu est déjà important en lui-même : Jéricho, la ville par laquelle on pénètre en Israël. Cet épisode se déroulant après la troisième annonce de la Passion et de la Résurrection (Mc 10, 32-34), ne faudrait-il pas voir là une étape décisive de la marche de Jésus vers Jérusalem, vers sa Passion et sa Révélation décisive, définitive ?

On remarquera aussi que c'est la première fois, du moins chez Marc, que Jésus marche vers Jérusalem non plus avec ses seuls disciples, mais avec une foule nombreuse. Pourtant, cette foule le comprend-elle, ne finira t-elle pas par le trahir ? A t-elle compris les "signes" ?

La rencontre avec Bartimée est un "lieu" fondamental de l'Évangile de Marc. L'aveugle est un marginal total dans la société de l'époque, quasiment assimilable au pestiféré, réduit à la mendicité. Sa marginalité est bien montrée par le fait qu'il est assis au côté du chemin. Par son arrêt, Jésus marque bien que son message s'adresse aussi aux exclus qu'il veut réhabiliter dans la société, par delà les préjugés.

Néanmoins, cet aveugle, seul dans sa cécité, comme l'est l'homme avant d'avoir vu Dieu, est en recherche : il va pousser un cri, faire une démarche personnelle. Son cri à Jésus est à la fois signe d'une grand détresse, mais aussi signe d'une incroyable confiance : il n'a pas vu mais il a confiance en Jésus ; Heureux ceux qui ont cru sans voir (Jn 20, 29). Il y a là un paradoxe car s'il est physiquement aveugle, spirituellement il voir avec exactitude qui est Jésus-Christ; il l'appelle Fils de David, c'est-à-dire qu'il lui donne la qualification du Messie attendu par le peuple élu (voir la promesse à David de 2S 7, 1-17). Son cri est un acte de Foi admirable. Et ce cri est aussi une demande : il fait le premier pas, et Jésus lui répond, à lui l'exclu, le quasi-pestiféré !

Le premier réflexe de la foule est de rejeter Bartimée. La foule a peur de l'exclu, de "l'anormal", du marginal; elle réagit comme les disciples qui rabrouaient les petits enfants (Mc 10, 13-16) Elle est comme la foule actuelle, comme la société qui tend à rejeter ce qui lui semble importun, ce qu'elle ne comprend pas, ce qui est "autre". Pourtant, malgré cette hostilité, Bartimée ne renonce pas : il insiste Aie pitié de moi ! .  Sa prière est insistante mais  non  provocatrice ; elle  est  confiance,  et c'est  pourquoi  Jésus lui répond Appelez-le ! , démontrant ainsi sa volonté de parler, d'accéder à tous. Et la foule va changer d'avis, commencer à parler de confiance (Mc 10, 49b). Elle va demander à Bartimée de venir, lui dit Lève-toi, il t'appelle . Ce lève-toi n'est pas innocent, car il est signe de notre élévation vers Dieu. Il est aussi fondamental car c'est egeirô qui est utilisé, pas anatellô ou un autre mot, egeirô qui se traduit par ressusciter, réveiller ! Il y a ici un lien, certes avec la Résurrection, donne la Bonne Nouvelle, mais aussi avec la belle-mère de Pierre (Mc 1, 31), le pardon au paralysé (Mc 2, 9), la main paralysée (Mc 3, 3), la lutte contre les faux dieux (Mc 13, 22) puisque chaque fois c'est egeirô qui est utilisé !

L'aveugle va jeter son manteau, son seul bien (voir aussi Ex 22, 25-26), se dépouiller pour se présenter "nu" de tout condition devant le Seigneur, car il a confiance, car il crois sans avoir vu ! Par ce geste, il rejette sa condition d'exclu puisque le vêtement symbolise la condition dans la société de l'époque (mais y a t-il eu vraiment changement dans la société actuelle ?), mais il rejette aussi tous ses biens, ce qui l'oppose au jeune homme riche. Il quitte tout pour se mettre à la suite de Jésus, il bondit ! Ce bond dans sa nuit est celui de la nuit à la Lumière (Jn 12, 46), bond vers la Foi, accès à la grâce salvatrice, élan irrésistible permettant de franchir le fossé de l'exclusion pour rejoindre non le conformisme mais la Foi, la société dans sa diversité ! Il sait déjà !

Jésus va alors lui poser une question, non pour le confondre (là je ne suis pas d'accord avec Saint Thomas d'Aquin) mais pour qu'il parle, pour qu'il accomplisse sa démarche. Jésus nous montre ici son respect de la liberté de l'homme. Jésus sait bien évidemment ce que veut Bartimée, mais il le respecte, il l'attend, attend sa question (cf. les questions de la samaritaine). L'homme doit aller au devant de Dieu, non pas seulement attendre; l'homme doit répondre à l'appel de Dieu. La question de Jésus introduit aussi Bartimée dans son intimité : Que veux-tu ?"

Bartimée va lui dire Rabbouni, soit bien plus que le Rabbi des Apôtres; il lui dit Mon Maître, à la fois en vénération, en familiarité, mais aussi en intimité et en communion : Mon, car il sait que Dieu s'adresse directement à chacun de nous, aime le plus infime d'entre nous ! Il veut voir, certes physiquement, mais aussi spirituellement; il veut voir Dieu, non pas seulement jésus vrai Homme, mais aussi Jésus vrai Dieu ! Jésus nous parle souvent de la Foi qui sauve, et on en a ici un exemple. Cette Foi qui sauve est un don de Dieu qui dépasse la seule guérison matérielle car elle est grâce et salut de l'homme total, physique, mais surtout spirituel. Bartimée va alors se mettre à la suite de Jésus, devenir un disciple parmi les autres….

On remarquera que tout est inversé à la fin de l'épisode : ⒜ Bartimée était assis : il est désormais debout ; ⒝ Bartimée était à côté de la route : il est désormais en marche sur la route ; ⒞ Bartimée était aveugle : désormais il voit ; ⒟ Bartimée était mendiant : désormais c'est lui qui va donner, donner la Bonne Nouvelle qu'il porte en lui !

Par cet épisode, l'Évangéliste nous montre que Jésus veut aller plus loin, veut amener l'homme vers une Lumière plus grande que celle de la vue, vers celle de la Foi, celle qui fait le vrai disciple. Par cet épisode, Jésus nous invite tous à le suivre, à ouvrir nos yeux pour accueillir le Messie triomphant et pour donner à notre tour, gratuitement, en serviteurs l'un de l'autre, la Foi ! Il y a comme effusion de l'Esprit-Saint : Jésus nous veut "tout", "tous" !

Ce miracle n'est pas que matériel, car il est lié à la Bonne Nouvelle, signe de sa présence (Mt 11, 2-6). Il est signe de la communication de la grâce salvatrice du christ aux nations, aux hommes (et là je suis d'accord avec Saint Thomas d'Aquin) et l'on peut penser ici à Jn 4, 1-42, à la samaritaine, car le message est identique ! Jésus veut nous libérer, spirituellement mais aussi socialement ! Jésus veut que tous soient établis ou rétablis dans la communion avec Dieu, mais il veut aussi que les exclus soient réhabilités dans la société, dans ce monde qui est élan vers Dieu ! Bref, Jésus veut sauver tous les hommes en les réhabilitant dans le monde, amis aussi en les intégrant dans la communauté de l'Amour ! Jésus convertit l'exclu, mais il convertit aussi le non-exclu qui est lui même souvent aveugle, non physiquement mais spirituellement ! Quelle leçon, car, nous les témoins, les voyants, les "normaux", avons-nous compris ? Ne sommes-nous pas des Bartimée, mais n'osant pas ou ne voulant pas aborder le Seigneur ? Bartimée, c'est pourtant nous tous….

 

 

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16 décembre 2009 3 16 /12 /décembre /2009 07:54

Hormis  [Ga 2, 11] et [1Co 1, 12], et encore de manière indirecte, aucun texte néotestamentaire n'atteste des étapes du voyage de saint Pierre vers Rome :

 

-         [Ga 2, 11] atteste d'un voyage de Céphas - nom que donne Jésus à Simon Pierre en [Jn 1, 42] - à Antioche, où il se heurte à saint Paul (ou plutôt l'inverse) ;

 

-         [1Co 1, 12] évoque un probable séjour de Céphas à Corinthe.

 

Le voyage vers Rome en passant par Antioche (au sud de l'Anatolie), puis par Corinthe, capitale de l'Achaïe, n'a rien d'invraisemblable, car il correspond à un mode assez classique de déplacement de la Judée vers Rome, combinant un transport par voie terrestre et un transport par voie maritime par cabotage, système bien plus courant à cette époque pour les marchands grecs que la traversée directe du type de celle de saint Paul décrite en [Ac 27-28, 16], plus caractéristique de la voie commerciale des romains, et surtout assez proche finalement du troisième voyage missionnaire de Paul [Ac 18, 22-21, 16]. Comme si saint Pierre qui n'est pas citoyen romain préférait suivre les routes des grecs, routes par ailleurs pratiquées le plus souvent par de nombreux commerçants juifs, saint Pierre semblant plus lié à cette communauté que saint Paul…

 

Par ailleurs, Origène (Hom. 6 in Luc), Eusèbe de Césarée et saint Jérôme (Cat. 1 ; In Gal. 11) attestent que saint Pierre s'est déplacé à Antioche avant de venir à Rome, et notamment en voyageant en partie par voie maritime.

 

De même, le ton général de la première Épître de Pierre (cf. 1P 1, 1), adressée aux communautés du Pont, de Galatie, de Cappadoce, d'Asie et de Bithynie, laisse apparaître que saint Pierre connaissait ces communautés, et qu'il charge Silvain (Silas) - qui semble d'ailleurs avoir aussi accompagné Paul à Antioche - de leur rapporter lors d'un voyage de retour vers la Judée un message. Et d'ailleurs Eusèbe écrit que saint Pierre prêcha l'Évangile aux juifs dispersés dans le Pont, la Galatie, la Bithynie, la Cappadoce et l'Asie mineure (HE 3, I, 2).

 

Ce sont néanmoins des sources apocryphes qui décrivent avec le plus de précision le voyage de saint Pierre, et en particulier le Martyrium du Pseudo-Linus en [1-29]. Ce texte se retrouve dans les éditions des Apocryphes réalisées par R. A. Lipsius en Allemagne à la fin du XIXème siècle, et en particulier dans son Die apocryphen Apolostolgeschichten und Apolstellegenden publié à Brunswick entre 1883 et 1890. L'Apocalypse de Pierre évoque également certaines de ses missions antérieures à sa venue à Rome. L'historicité de ces sources est cependant partiellement remise en cause par Eusèbe de Césarée.

 

On pourrait donc supposer un voyage de Pierre selon la route suivante, l'agacement de Paul  en [Ga 2, 8] qui semble alors faire montre d'une opposition sur une mission qu'il juge comme lui revenant depuis le "concile" de Jérusalem pouvant en être une preuve indirecte (on peut aussi penser à la querelle quasiment permanente entre proclamation de la Bonne Nouvelle aux Juifs et aux Gentils, et saint Paul se plaint souvent d'enseignements concurrents ;  ceux de saint Pierre ?) :

 

Jérusalem à Cilicie (Antioche) à Cappadoce (?) à Galatie (Césarée ?) à Pont (?) à Bythinie (?) à Asie mineure (Éphèse ?) à voyage par mer vers l'Achaïe à Achaïe (Corinthe) à voyage par mer jusqu'en Italie à Rome.

 

Pour mémoire, quelques sources laissent entendre deux voyages de Pierre à Rome…

 

 

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